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                                                                                               Entretien 

 

Nous sommes allés à la rencontre de Thierry Bourdas, ingénieur civil à la Mairie de Paris. Il travaille sur un projet « Belib’ » qui vise à déployer un réseau de borne de recharge pour voiture électrique.

 

 

Quelles seront les spécificités des bornes de recharge « Belib’ » ?

 

L’objectif est d’installer 60 stations dont chacune pourra prendre en charge 3 voitures simultanément pour une recharge en seulement une heure. Les bornes de recharge seront branchées sur le réseau ERDF.

 

Quels sont les différents types de recharge ?

 

Il y a trois types de recharge :

  • 3kw c’est la recharge à la maison qui dure, en général, sept à huit heures.

  • 22kw entre trois et quatre heures.

  • 50kw c’est la recharge entre trente minutes et une heure.

 

Sachant que 80% de la recharge se fait à la maison et 20% sur la voirie, pourquoi se focaliser sur les bornes de recharges publiques ?

 

Dans un premier temps, ces statistiques témoignent justement d’un manque de borne de recharge dans l’espace publique auquel il est important de palier si on veut concrètement inciter la population à passer à l’électrique, il faut pouvoir leur apporter une certaine praticité. Dans un deuxième temps, concernant les recharges à domicile, si on veut développer un réseau électrique « intelligent » il faudrait effectuer des changements directement dans les foyers. Une telle démarche s’inscrirait dans ce qu’on appelle le « Smart Grid » mais c’est très couteux et fastidieux à mettre en place, cependant, à long terme ça serait une solution financièrement et écologiquement profitable à tous.  

 

Justement, peut-on dire qu’une voiture électrique est un investissement qui en plus d’être écologique, se veut plus avantageux financièrement aussi ?

 

Cela coûte entre 1 euros et 3 euros pour faire 100km. Une voiture électrique est moins chère à l’usage qu’une voiture traditionnelle, tant sur la consommation que sur l’entretien. Le prix d’une voiture électrique dépend du prix de sa batterie. On peut recycler les batteries mais cela reste trop couteux.

 

La société israélo-américaine Better Place a développé une station dotée d’une technologie de batterie interchangeable automatique aussi facile d’installation qu’une pile électrique mais cela n’a pas fonctionné, comment vous l’expliquez ?

 

C’est innovant mais surement pas assez rentable pour le nombre de voiture électrique en circulation. Mais la raison principale à souligner est que dans l’industrie de l’automobile, il est de coutume que les marques appuient leur force de marketing par des innovations qui leurs sont propres et marquent la particularité de leurs véhicules sur le marché. Ainsi dans cette optique, il est impossible de leur imposer un produit innovant commun. Cela n’a pas fonctionné pour la simple raison que les constructeurs devaient concevoir leur voiture en fonction de ces batteries et non pas l’inverse.

 

 

Peut-on voir un intérêt politique dans le développement de la voiture électrique ?

 

Il y a une volonté géopolitique d’une indépendance énergétique. Aujourd’hui, la France n’est pas productrice de pétrole alors qu’elle peut le devenir pour l’énergie électrique comme elle l’est pour le nucléaire. Si demain, on a plus besoin de pétrole, nous serons plus dépendant des pays qui en produisent.

 

On restera tout de même dépendant des matériaux comme l’uranium ?

 

Il est vrai que nous restons dépendant des matériaux rares comme l’uranium mais ce qu’il faut savoir c’est qu’aujourd’hui il y a beaucoup de recherches et sur les batteries notamment ; il en existe qui n’utilisent plus de matériaux rares. On retrouve encore derrière cette recherche, une réelle volonté politique.

 

Indéniablement, la voiture électrique est moins polluante que la voiture thermique, mais peut-on en dire autant de sa production ?

 

En effet, les voitures électriques sont localement moins polluantes à l’usage, il y a zéro émission. Cependant en fabriquer une n’est ni plus ni moins polluant car elles sont fabriquées dans les mêmes usines. Par ailleurs, il y a la fabrication de la batterie qui se fait par d’autres industriels selon des cycles de production labélisés, mais la question importante est la deuxième vie de la batterie. Il y a différents usages qui commencent à se développer, notamment pour en faire du stockage d’énergie.

 

Pour la question de la fin de vie de la batterie, comment recycler définitivement tous les composants de la batterie ?

 

Aujourd’hui ce sont des batteries lithium-ion, il y a toute une industrie qui permet de recycler ces batteries. Du puit à la roue, est ce que cela est-il plus ou moins polluant que la voiture thermique ? Si on prend toute la vie de la voiture électrique, il y a différentes études sur le sujet qui prouvent qu’il n’y a rien d’alarmant là-dessus, en revanche, le point le plus critiqué sur la voiture électrique est tout ce qui concerne la production d’énergie.

 

Pour conclure, la question la plus essentielle est de savoir si demain dans un monde où les stratégies marketing et la volonté politique se concrétiseraient, une suprématie de la voiture électrique ne se heurterait-elle pas à une incapacité à produire de l’électricité de masse écologiquement ?

 

Effectivement, cela varie selon les pays. Vous savez qu’en Chine ou en Allemagne, l’énergie est principalement produite par les usines à charbon. En France, on est critiqué pour le nucléaire. Il y a d’autres pays qui utilisent plutôt les barrages et qui ont aussi un impact sur l’environnement. On voit bien qu’aujourd’hui il n’y a pas de solution miracle pour produire de l’électricité en masse. Malgré tout il y a beaucoup de recherche sur l’éolien et le solaire, ce qui nous laisse présager qu’à moyen terme on arrivera à un mixte d’énergie et peut être, un jour, à une énergie durable définitivement. Pour conclure, c’est le point sur lequel il reste encore beaucoup de travail à faire.

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